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VÉNÉRER DIEU
lundi 25 septembre 2023
Les croyants pensent généralement qu’il est de leurs devoirs de vénérer le Créateur, voire que Dieu exige d’eux qu’ils l’adorent et le craignent. Et qu’en échange ils en seront bénis.
Les croyants pensent aussi que le Créateur est de toute éternité : qu’il n’a pas eu de début et n’aura pas de fin (ce qui est l’acception première de l’adjectif “éternel” et, donc, la définition première de ce qu’il est l’unique à être). Et n’est-il pas exact de penser qu’avant d’être amour, justice, intelligence, puissance… Dieu est ? Oui, nous devons convenir que Dieu n’a pas reçu quoi que ce soit de qui que ce soit avant que d’être. Sauf s’il n’est qu’imaginaire, bien entendu !
Mais les croyants, au travers de leur irréductible anthropomorphisme — et du haut de leur petitesse d’hommes —, pensent pouvoir donner à Dieu, quand ils ne peuvent que recevoir de Dieu ! La superstition s’instille presque toujours dans la plupart de leurs croyances. Et, le plus souvent, nul d’entre eux n’échappe à son insidieuse influence !
Eu égard au don extraordinaire de la vie, les croyants acceptent habituellement l’idée de devenir les esclaves de leur Créateur. Cela leur paraît aller de soi qu’il leur faille le servir par un service sacré. Et c’est là que nous ne pouvons adhérer à leur vision des choses. Outre que nous ne sommes pas fondamentalement des leurs, puisque nous ne sommes pas des croyants à proprement parler — nous rangeant plutôt du côté des espérants, en proie à une forme d’agnosticisme —, nous ne pensons pas que nous devons servir Dieu pour mériter qu’il nous maintienne en vie. Nous pensons au contraire qu’il est de son devoir à lui de nous maintenir en vie, à présent qu’il a unilatéralement décidé de nous sortir de l’inexistence et de nous donner une conscience dans laquelle il a — et c’est fondamental — implanté le désir de vivre à jamais.
Mais ne vous y trompez pas : pour autant, une fois redevenus parfaits, nous ne prétendons guère que nous pourrons faire délibérément le mal impunément.
Là où les croyants affirment qu’il faut dès maintenant faire quelque chose pour mériter la vie, nous pensons, nous, qu’il n’y a rien qui puisse être fait pour la mériter, ni ne pourra jamais l’être, même une fois redevenus parfaits. En revanche, qu’il ne faille pas faire certaines choses — qu’il ne faille pas commettre certaines actions en rapport avec le mal pour être clairs —, et, qu’une fois redevenus parfaits, il faudra se garder du mal sous toutes ses formes, ça, nous le professons. Pour nous résumer, nous pensons qu’il est impossible de mériter la vie, mais possible d’en démériter.
Nous entendons d’ici certains dire que cela revient au même ! Nous nous inscrivons en faux contre l’idée que devoir faire une certaine catégorie d’actions équivaudrait à s’en abstenir, et ce, plus sûrement encore si ce sont deux catégories différentes d’actions, voire opposées, comme faire le bien et ne pas faire le mal ! Dans le cas de la vie qu’il faudrait mériter, faire quelque chose pour la garder [1] ne revient pas à s’abstenir de commettre certains actes pour ne pas la perdre.
L’on pourrait digresser et vouloir nous emmener sur le terrain de l’action dont la vertu principale serait de nous éloigner de toute attitude d’attente indéfinie et passive, et nous reconnaîtrions le caractère positif de l’action (faire) sans pour autant attribuer de caractère négatif à l’inaction (ne pas faire). Mais quand bien même l’action l’emporterait sur l’inaction — ce qui est incertain —, nous n’y verrions guère d’argument probant en faveur de l’idée selon laquelle les humains doivent faire quelque chose — et encore moins toute une série de choses — pour mériter de rester en vie.
Donc, la plupart des croyants soutient qu’il est obligatoire de manifester de la vénération pour Dieu et de lui faire des offrandes diverses et variées. La passivité est souvent proscrite au bénéfice de l’engagement, de l’activité. Nous ne reprocherons certainement pas à ces croyants de vouloir témoigner leur attachement à Dieu, même si notre conviction nous empêche de croire qu’il soit possible pour eux de mériter la vie en échange.
Ceci étant dit, nous ne pouvons ignorer qu’il existe probablement une frange d’entre les croyants — voire une proportion importante, nous ne saurions le dire — qui manifeste spontanément et sans arrière-pensée un dévouement véritablement désintéressé, sans l’idée d’une contre-partie à venir. Et ne pouvons ignorer non plus qu’il soit probable que ces esclaves retirent une grande satisfaction au travers de leur servitude, sortes de prémices au futur bonheur véritable !
[1] Pour garder la vie et non pour la recevoir. Nous le soulignons. Nous savons tous qu’il ne nous a pas fallu faire quelque chose pour la recevoir. Il s’agit là de plus qu’une nuance ! Il s’agit en réalité d’une grosse différence qui pourrait suffire à prouver à elle seule qu’il est impossible de mériter la vie.